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« Je reviendrai ! »

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Jeudi 5 novembre : le jour où Jean Reno a illuminé la Cité ardente de sa rayonnante présence. Retour sur une rencontre magique entre cette légende vivante du septième art et un public liégeois absolument sous le charme.

Dès le matin, photographes, journalistes, étudiants et professionnels du cinéma se pressaient à la superbe Mosa Ballet School pour accueillir cette légende vivante du cinéma.

« Je suis très honoré et heureux d’être ici, car la Belgique me touche, ses actrices et acteurs aussi », confiait Jean Reno, venu expressément avec son épouse de New York – où il aime savourer de bonnes bières belges – pour recevoir un Taureau d’Or d’honneur lors de la cérémonie d’ouverture du FIFCL. « Ce festival doit grandir, mais à son rythme, pas trop vite, afin de ne pas perdre son humanité. »

Pendant plus d’une demi-heure, Jean Reno livra quelques confidences sur sa carrière et son analyse fine du cinéma. Du mythique film Léon, il se souvient de la solitude : « C’est un rôle qui nécessitait cette solitude. Je me souviens avoir regardé les matchs de Michael Jordan avec Patrick Camboulive… Et je ne suis allé déjeuner avec Gary Oldman – dans un quartier très mal famé de New York – qu’après ma mort dans le film. » Il confia également qu’il lui est impossible de choisir un film plutôt qu’un autre : « Un film, c’est avant tout des rencontres. »

L’inoubliable interprète d’Enzo Molinari dans Le Grand Bleu, de Léon dans le film éponyme, de Godefroy de Montmirail dans la saga Les Visiteurs, de Pierre Niemans dans Les Rivières Pourpres, ou encore d’Ange Leoni dans L’Enquête corse, de Victor dans Nikita et d’Hubert Fiorentini dans Wasabi abordait aussi le rôle du metteur en scène : « C’est quelqu’un d’ambigu. Est-il ami intime ou ennemi intime ? Il va gratter là où ça fait mal pour obtenir quelque chose de l’acteur. » Et de glisser avec humour : « On dit dans le milieu qu’un réalisateur est celui qui fait Dieu quand Dieu n’est pas là. »

Tout au long de son incroyable carrière, celui qui a grandi au Maroc a travaillé avec d’immenses comédiennes et comédiens : Natalie Portman, Romy Schneider, Robert De Niro, Sean Penn, Charlize Theron, Christian Clavier, Vincent Cassel, Marie-Anne Chazel, Tom Cruise, Bruce Willis… La liste n’est évidemment pas exhaustive tant sa filmographie est impressionnante. « Sur un plateau de tournage, il faut respecter le rythme de l’autre sans se perdre soi-même. Dans une comédie, par exemple, l’autre est hyper important, ou alors c’est un numéro », observait-il avant d’oser une comparaison avec le… tennis : « Quand le partenaire sait jouer, c’est jubilatoire. Quand ce n’est pas le cas, c’est un peu chiant. » Et d’ajouter : « J’ai démarré au théâtre, en troupe. Pour moi, le groupe est important. C’est ensemble que cela marche. Il n’y a que Tom Cruise qui croit qu’on fait des films tout seul ! »

S’il n’a pas la recette d’une comédie réussie, Jean Reno reste convaincu que c’est souvent « grâce au mariage exceptionnel de celui qui écrit le film, de celui qui le filme et de ceux qui le jouent, comme quand Louis de Funès rencontra Gérard Oury ». Cette légende vivante ne manquait pas de rappeler ses origines andalouses : « En Espagne, on rit beaucoup car il y a cette notion de la mort qui est très présente. J’aime d’ailleurs beaucoup mélanger le rire et la futilité humaine. Pour moi, rire est un médicament, cela me fait du bien. Et je ris de tout. » Et de prédire : « Le Festival de Liège va d’ailleurs devenir mondial, car le rire intéresse tout le monde. »

Le soir, le Forum était plein à craquer – 1 500 personnes ! – pour le gala d’ouverture de cette dixième édition du Festival International du Film de Comédie de Liège. Parmi le public, une ribambelle de politiciens, Son Altesse Royale le Prince Laurent, de nombreux artistes et personnalités ainsi qu’une multitude d’amateurs du septième art et de fans de Jean Reno à qui était consacrée cette soirée.

Après l’ouverture de la cérémonie par PE, le passage du Jury international sur scène et la diffusion d’extraits des films en compétition, Jean Reno rejoignit une Joëlle Scoriels totalement fan pour un moment suspendu. Terriblement touchant, l’acteur était visiblement ému : « Le temps a passé mais le temps est précieux, car on n’en a pas beaucoup. Il y a des pays, comme le Japon et la Belgique, où je me sens bien et je ne sais pas pourquoi… Vous m’avez montré beaucoup d’amour. »

Face à un public conquis, Jean Reno livra quelques impressions et anecdotes sur sa prodigieuse carrière : « Pour moi, un acteur c’est comme un immeuble, il faut des fondations. » Il évoqua aussi les différences entre le cinéma américain et le cinéma français : « La seule différence, c’est l’espace. Dans les films à gros budgets comme on peut en faire aux USA, il y a plus d’espace. C’est moins sympa car il y a plus de solitude. » Et de confier : « Je rêve de tourner un film autour de la musique mais je n’ai jamais reçu un scénario assez conséquent. J’adorerais visiter un personnage qui entend la musique dans sa tête. »

Sincère, drôle, attentif, Jean Reno eut la surprise de recevoir des messages vidéo d’amis – Christian Clavier, Marie-Anne Chazel, Caterina Murino, Gérard Lanvin et Olivier Marchal – mais aussi de voir monter sur scène Jean-Marc Barr, son partenaire dans Le Grand Bleu, et Jean-Marie Poiré, le réalisateur des Visiteurs et de L’Opération Corned Beef. Avec Barr, à propos du Bleu, ils tombaient d’accord : « Ce sont les spectateurs qui ont défini le succès de ce film. C’est le public qui a fait ce film, pas nous. » Et de livrer un message : « Il faut rêver, y croire, même si ça prend du temps, sortir les ailes. »

Un Taureau d’Or d’honneur était ensuite remis à Jean Reno par son épouse Zofia Borucka. Très ému, la légende du septième art concluait sur une standing ovation : « Pourquoi fait-on l’acteur ? Pour être aimé. Et vous l’avez fait ce soir… Je reviendrai ! »

Thiebaut Colot

Le récit de la conférence de présentation du FIFCL : « Ce festival va devenir mondial car le rire intéresse tout le monde » — #Liégeois

Le portrait de Théo Fernandez, membre du Jury International : « C’est une vocation » — #Liégeois

Plus d’informations sur le FIFCL : 10e Festival International du Film de Comédie de Liège – FIFCL

Crédits photos : Sonia Pecharroman Sorce

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